"Boulevard de la Mort" de Quentin Tarantino

Publié le par Alban

Bonjour à tous !

 

Cela aura pris du temps, mais voici enfin ma critique du nouveau film de Quentin Tarantino. Souvent, voire constamment affublé de l’étiquette de cinéaste « pop-art » dans l’esprit d’Andy Warhol, Tarantino n’échappera pas une fois encore à cette réputation avec « Death proof » (j’utilise le nom anglais du film car plus pratique et surtout plus élégant…) où il digère à nouveau le concept des films de série B des années 70 et s’associe à son pote Robert Rodriguez afin de nous livrer « Grindhouse » un film en 2 parties séparées par de fausses bandes-annonces qui malheureusement ont été perdues lors du passage outre-Atlantique qui a vu les deux parties séparées en deux long-métrages distincts suite au succès plus que relatif du double programme en Amérique…

 

Mais heureusement ces bandes-annonces sont disponibles sur internet et je vous les avais fait découvrir dans un de mes articles précédents. Vous pouvez les découvrir ou redécouvrir en cliquant sur le lien qui précède. Sachez par ailleurs que la fausse bande-annonce de « Machete » va faire l’objet d’un véritable long-métrage dédié et réalisé par Robert Rodriguez : voilà qui est alléchant ! Mais revenons à nos moutons, c'est-à-dire à « Death proof » le long-métrage de Quentin Tarantino. C’est parti !

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Synopsis : C'est à la tombée du jour que Jungle Julia, la DJ la plus sexy d'Austin, peut enfin se détendre avec ses meilleures copines, Shanna et Arlene. Ce trio infernal, qui vit la nuit, attire les regards dans tous les bars et dancings du Texas. Mais l'attention dont ces trois jeunes femmes sont l'objet n'est pas forcément innocente.  C'est ainsi que Mike, cascadeur au visage balafré et inquiétant, est sur leurs traces, tapi dans sa voiture indestructible. Tandis que Julia et ses copines sirotent leurs bières, Mike fait vrombir le moteur de son bolide menaçant...

« Death proof » joue avec le plaisir que la répétition crée chez le spectateur. « Death Proof » est en fait deux films en un. Les deux parties étant le même film répété mais avec un déroulement et une issue différente. Le même esprit est conservé dans la répétition de la scène de crash, dont je reparlerais plus loin, où la répétition est la source d’un crescendo de violence assez jouissif. Oui le mot est bien choisi malgré les circonstances car il est clair que le personnage interprété par Kurt Russel (Qui est ici en plein retour en grâce. Tarantino n’a décidément pas son pareil pour ranimer les stars retombée au statut de has-been. Souvenez vous de Travolta dans Pulp Fiction) vit cet accident comme un véritable orgasme à répétitions. Dimension sexuelle qui est d’ailleurs largement soulignée notamment dans le plan assez délirant de Kurt Russel assis sur le capot de sa voiture, son bouchon de radiateur représentant un canard à la fière allure placé délicatement dans son entrejambe…

 

Tarantino a rempli son film de références à sa propre filmographie : la sonnerie de portable rappelant le sifflement de Daryl Hannah dans Kill Bill (séquence de l’hôpital), le petit déjeuner du deuxième groupe de filles en travelling circulaire qui rappelle la séquence d’ouverture de « Reservoir Dogs », la fameuse et devenue culte, prise de vue depuis le coffre, le Big Kahuna Burger, apparition de sa personne dans le film et probablement d’autres… On notera également un clin d’œil à Sofia Coppola (avec qui il est sorti durant quelque temps) par un plan assez bref sur des magazines ayant en couverture des photos du film « Marie-Antoinette ». On retrouve également de (trop?) longues séquences dialoguées au sein du film qui en agaceront certains et en raviront d'autres car il faut avouer que s'il est une chose à laquelle Tarantino soit définitivement doué c'est bien l'écriture de dialogues ! Ici on ne déroge pas à la règle et on se régalera de nombreuses punchlines doublées d'un humour décapant.

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Dans la même veine on retrouve bien sûr tout au long du film le fétichisme pédestre qui obsède Quentin mais aussi un fétichisme situé plus bas car focalisé sur les fessiers des charmantes demoiselles qu’il se délecte à filmer… Autant vous dire que les spectateurs masculins ne devraient pas s’en plaindre. Le summum étant atteint lors de la fameuse scène de la danse érotique qui par chance n’a pas été coupée au montage ce qui semble avoir été le cas de l’autre côté de l’Atlantique où elle était remplacée par la fameuse inscription « Bobine manquante » qui venait renforcer le côté « Grindhouse » du film. En effet, des bobines manquaient parfois au sein de ces petits films de série B des années 70. Mais Tarantino n'en a pas pour autant oublié de truffer son film de procédés plus ou moins ingénieux et/ou agaçants pour marquer la parenté de son film à cette lignée de films décalés des seventies : passage incongru en noir et blanc, sautes de l'image et du son... etc.

 

Aucun doute Tarantino aime Tarantino et fait du Tarantino. Et même si ces auto-références pourront en agacer plus d’un, il faut plus y voir un jeu de la part du réalisateur. De nombreux éléments de réponse justifiant cette attitude se trouvent dans le fabuleux et énorme entretien qu’il a accordé aux Cahiers du cinéma pendant le festival de Cannes. On y découvre que Quentin est assez mégalo mais qu’en fait c’est cela qui le pousse à se dépasser et qui donne de si bons résultats à l’écran. Ainsi il avoue que quand il réalise une scène classique du cinéma (par exemple la bagarre de samouraïs dans Kill Bill quand The Bride se bat contre les Crazy 88) il la réalise en vue de la rendre culte et de la faire rentrer dans l’Histoire du cinéma… Rien que ça. Mais il faut avouer que pareille attitude lui réussit plutôt bien alors ne lui reprochons rien et apprécions…

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On comprend mieux ce que veut dire Quentin Tarantino quand il tient de tels propos à la vision de quelques scènes de « Death proof » qui sont pour ainsi dire immédiatement devenues cultes La fabuleuse scène du crash en est un parfait modèle : répétée 4 fois et sous 4 points de vue différents, elle fait passer ce qui était selon moi la référence en la matière, j’ai nommé «Crash » de David Cronenberg, pour un exercice de style un peu dépassé… (Ce qui n’ôte rien à la qualité de ce film) Il faut le faire. Dans la même veine je demande la gigantesque et magistrale scène de course-poursuite de fin qui dans le genre est véritablement monstrueuse et ce, dans le bon sens du terme.

 

Mise en scène inventive et dynamique, scénario et concept jouissifs, le tout traité avec brio et avec une belle lumière également signée Tarantino qui était pour la première fois son propre directeur de la photographie, prenant ainsi exemple sur son pote Robert Rodriguez qui accumule les postes au tournage. Le casting est très bon et très féminin, bref que dire de plus si ce n’est que cet ensemble crée une alchimie pour le moins réussie et remonte encore le film vers le haut. Tarantino nous livre son film le plus urgent mais aussi le plus épuré de sa filmographie. Un vrai aboutissement et une nouvelle preuve qu’il est un grand cinéaste avec lequel il faut compter.

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Tarantino est peut-être obsédé par les pieds, nous n’avons rien à redire car nous prenons sévèrement le notre en visionnant « Death proof ». Vous en aurez largement pour votre argent en allant voir ce film. Le cinéaste, génie un peu rebelle, nous livre une nouvelle fois un chef-d’œuvre ultra référencé qui risque bien de devenir une nouvelle référence. Il a annoncé vouloir maintenant se pencher sur son projet de film de guerre datant de déjà un bon moment « Inglorious Bastards » et pour lequel il devrait tourner une majorité de scènes en France… Le buzz monte et on en a déjà l’eau à la bouche… Affaire à suivre donc !

 

Note : 4,5/5


Tarantino signe un chef-d’œuvre bourré de références et maîtrisé de part en part. La note maximale n’est pas atteinte en raison des nombreux dialogues et des auto-références qui pourront en agacer quelques uns… Mais ce sont surtout des prétextes pour justifier le fait que la perfection n’existe pas !

 

 

Publié dans Critiques de films

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J
J'ai adoré... <br /> Et puis la salle dans laquelle nous avons vu ce film était vraiment adéquat... plus underground et avec plus de vibrations du métro, je crois qu'on aura du mal à trouver!!<br /> Notre première séance de ciné... vivement la prochaine!! C'est tellement moins drôle un ciné tout seul... surtout un Tarantino! Le cynisme, ça se partage!
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M
Et bien moi j'ai trouvé ce film énorme ! Je mettrais la même note que toi. Et j'ai adoré aussi les scènes de dialogue que je n'ai pas du tout trouvé trop longue. Le film est vraiment juissif, j'ai éclaté de rire par endroit, et j'ai vraiment apprécié. Tarantino est un des seul à pouvoir faire ce genre de cinéma aux Etats-Unis et on le remercie.
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